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Le Tissu Epithélial (cours N°2)

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III) EPITHÉLIUMS DE REVETEMENT

A) définition : les épithéliums de revêtement sont des tissus épithéliaux de surface exerçant des fonctions de barrière et de protection.

B) terminologie : il existe deux catégories d’épithéliums de revêtement et une catégorie de tissu apparentés aux tissus épithéliaux de revêtement.

1) l’épiderme : il s’agit de l’épithélium recouvrant la surface externe de l’organisme . Il a une structure uniforme et constitue la couche superficielle de la peau. L’épiderme repose sur 2 couches de tissu conjonctif qui se sont la superficie vers la profondeur : le derme et l’hypoderme.

2) les épithéliums muqueux : ils recouvrent la surface interne des cavités ouvertes de l’organisme (voies digestives, voies aériennes et voies uro-génitales). Ils sont nommés selon leur localisation (épithélium oesophagien, épithélium bronchique, urothélium) et forment la couche superficielle des muqueuses. Chacun d’eux à une structure qui lui est propre mais ils reposent tous sur couche de tissu conjonctif nommé chorion.

3) tissus apparentés aux épithéliums de revêtement : Ces tissus ne regroupent pas l’ensemble des caractéristiques propres aux tissus épithéliaux.

a) Les mésothéliums : ils participent à la formation des tuniques séreuses de l’organisme que sont le péritoine, les plèvres et le péricarde.  Le tissu conjonctif sous-jacent y est peu développé et nommé couche sous-mésothéliale. Ils peuvent être le siège de tumeurs malignes, les mésothéliomes, dont le plus fréquent est la mésothéliome de la plèvre. Il s’agit d’un cancer d’une très haute malignité (survie moyenne inférieure à 1 an) secondaire à une exposition aux fibres d’amiantes. Le mésothéliome est caractérisé par sa très grande latence de développement (3 à 5 décades après l’exposition aux fibres toxiques). Il se développe préférentiellement dans le 1/3 inférieur de la plèvre et se manifeste initialement par un épaississement diffus de la plèvre.

b) Les endothéliums sont constitués de cellules endothéliales et forment le tissu de revêtement de la surface endoluminale des vaisseaux. A la différence des cellules épithéliales, les cellules endothéliales n’expriment pas la cytokératine, ne sont pas toujours réunies par des jonctions serrées et reposent sur un TC peu développé  nommé couche sous-endothéliale.  Elles ne sont jamais réunies par des complexes de jonctions et peuvent même être non jointives. La diversité de structure des endothéliums est plus marquée pour les capillaires. Il existe trois types de capillaires.

* Les capillaires continus sont les plus fréquents dans l’organisme. Les cellules endothéliales sont réunies par des jonctions serrées de type macula occludens (et non zobula occludens comme dans les épithéliums). La lame basale est continue et se dédoublepar endroit pour accueillir des péricytes (cellules à double valence musculaire lisse et macrophagique).

* Les capillaires fenestrés sont caractérisés par la présence de pores trans-cytoplasmique au sein des cellules endothéliales . Ces pores facilitent le passage des molécules sanguines. La lame basale est en revanche continue. Les capillaires fenestrés sont présents dans les sites anatomiques ou les échanges moléculaires sont abondants (glomérule rénale, villosités intestinales, plexus choroïdes).

* Les capillaires discontinus sont formés de cellules endothéliales non jointives (interstices ente les cellules), présentant de larges pores trans-cytoplasmiques et reposant sur une lame basale discontinue. C’est le cas au niveau des capillaires du foie (capillaires sinusoïdes), de la rate et de la moelle osseuse. Dans la rate et la moelle osseuse, ces spécificités histologiques permettent le passage de cellules à travers la barrière endothéliale. Dans le foie, elles permettent l’ancrage intravasculaire des macrophages résidents du foie, les cellules de Kupffer.

c) Les épithéliums sensoriels sont constitués de neurones sensoriels et de cellules gliales de soutien. Ils sont apparentés aux tissus épithéliaux de revêtement car ils forment une couche de cellules jointives reposant sur une lame basale.

C) Classification :

Elle est basée sur 3 critères principaux : le nombre de couches cellulaires, la forme des cellules et leur état de différenciation.

1) nombre de couches cellulaires : selon le nombre de couches cellulaires on parlera d'épithélium simple ou d’épithélium stratifié (synonyme = pluristratifié ; bistratifié lorsqu’il y 2 couches). Un cas particulier, les épithéliums pseudostratifié : dans ce cas les noyaux des cellules sont étagés ce qui donne un aspect stratifié en microscopie optique alors qu'en microscopie électronique on observe que toutes les cellules sont en contact avec la lame basale. Il s'agit donc en réalité d'un épithélium simple nommé épithélium pseudostratifié sur son aspect en microscopie optique.

2) forme des cellules : on parle d'épithélium pavimenteux lorsque les cellules sont plus larges que hautes, d'épithélium cubique  lorsque les cellules sont aussi larges que hautes et d'épithélium cylindrique ou prismatique lorsque les cellules sont plus hautes que larges. Lorsqu'il s'agit d'épithéliums stratifiés, seule la forme des cellules participant à la couche la plus superficielle de l'épithélium est prise en compte. Par ailleurs, on  définit parfois les épithéliums pseudostratifiés sur la forme des cellules les plus superficielles.

La combinaison des 2 critères (forme et nombre de couches) permet de discerner 5 principales catégories d'épithéliums : pavimenteux simple, cubique simple, cylindrique simple, pavimenteux pluristratifié, pseudostratifié.

Enfin, il faut noter que les épithéliums  pluristratifiés pavimenteux peuvent être nommés épithéliums  malpighiens, du nom de celui qui les a décrits (Malpighi).

3) état de différenciation cellulaire : les différenciations les plus fréquentes sont les différenciations dites apicales. Elles concernent le domaine apical de la membrane plasmique et/ou le pôle apical du cytoplasme. Ces différenciations apicales sont à distinguer des différenciations concernant l'ensemble de la cellule et qui sont principalement représentées par la kératinisation (spécifique de l'épiderme).

3-1 différenciations du domaine apical de la membrane plasmique : Il s'agit d’expansions du domaine apical de la membrane plasmique  revêtant 3 formes : les microvillosités, les cils vibratiles et les stéréocils.

a) les microvillosités sont des expansions en doigt de gant qui peuvent être isolées ou au contraire très nombreuses (jusqu’à plusieurs milliers par cellules) et qui peuvent s’organiser alors en rangées ordonnées. On parle dans ce cas de plateau strié ou de bordure en brosse (termes synonymes). Les deux localisations les plus typiques de la différenciation en plateau strié sont l’épithélium intestinal et l’épithélium du tube contourné proximal du rein.  Les microvillosités sont recouvertes d’un revêtement glycoprotéique riche en enzymes : le cell coat ou glycocalyx. Lorsque les microvillosités sont très nombreuses, en particulier lorsqu'elles forment une bordure en brosse, le glycocalyx est visualisable en microscopie optique par la réaction de Schiff à l’acide périodique (PAS).

Le PAS colore en rouge les résidus glycosylés présents au niveau du cell coat, de la lame basale et au niveau des sécrétions muqueuses d'une façon générale. L’ultrastructure des microvillosités comprend un axe central de quelques dizaines de microfilaments d’actine qui s’ancrent à un réseau de microfilament localisé sous le domaine apical de la membrane plasmique et que l’on nomme plateau terminal (ou terminal web).

Au plan moléculaire, les microfilaments d’actine s’associent à un ensemble de molécules qui permettent de maintenir la structure des microvillosités. Pour mémoire ces molécules sont les suivantes :

i) la villine et la fimbrine permettent la  fasciculation (i.e l’assemblage en faiceaux) des microfilaments d'actine 

ii) la myosine 1 et l'ézrine permettent l’attachement des microfilaments d’actine à la membrane plasmique

iii) la spectrine assure les interconnexions entre filaments d’actine au niveau du plateau terminal. La fonction des microvillosités est double : augmenter la surface de défense (image montrant une bactérie s'attachant aux microvillosités intestinales) et augmenter la surface d’échange et d’absorption.

b) les cils vibratiles : il s’agit d’expansions cytoplasmiques mobiles et dont les battements sont synchrones (les microvillosités sont mobiles mais n’ont pas de mouvements synchrones). Les cils vibratiles  permettent le déplacement de sécrétions muqueuses. Les exemples les plus typiques sont donnés par l’épithélium bronchique et l’épithélium des trompes utérines (oviducte).

En microscopie optique, les cils vibratiles  sont détectables en coloration standard du fait de leur longueur (10 fois plus long que les microvillosités) et de la présence d'une ligne localisée sous le domaine apical de la membrane plasmique, la ligne des corpuscules basaux. 

Les cils vibratiles  sont formés schématiquement d'un axe contenant des éléments du cytosquelette, l'axonème, et d'une racine ciliaire qui est séparée de l'axonème par deux structures qui sont le corpuscule basal et la plaque basale.

À la différence des microvillosités qui sont formés de microfilaments, l'axe des cils i.e l'axonème est constitué de microtubules qui suivent une organisation spatiale extrêmement précise.   Cette structure microtubulaire est commune aux cils vibratiles et aux flagelles des spermatozoïdes. On y trouve 4 types de microtubules : les MT dit de type A et B forment 9 doublets périphériques  et les microtubules C1 et C2 forment des singletons  centraux. Ces deux singletons sont entourés d'une fine membrane, la membrane centrale, qui est reliée aux doublets périphériques par les fibres rayonnantes encore appelées radial spokes. Les doublets de microtubules sont reliés entre eux par des molécules de nexine  et envoient ce qu'on appelle des bras internes et externes de molécules de dynéine qui portent l'activité ATPasique  indispensable au battement ciliaire.

C'est le mouvement synchronisé des molécules de dynéine d’avant en arrière qui va entraîner la flexion de l'axonème. Pour mémoire, l'association en doublet des microtubules  de type A et B s'effectue par la mise en commun de protofilaments de tubuline (un protofilament est issu de la polymérisation d'une multitude de molécules de tubuline alpha et beta). Seul le microtubule A possède 13 protofilaments  alors que le microtubule B n'en possède que 10 et forme un cercle incomplet accolé au microtubule A. Les microtubules de l'axonème sont en permanence renouvelés et organisés à partir d'une structure de type centriole, localisée  sous le domaine apical de la membrane plasmique : le corpuscule basal. Dans cette zone, l'alignement des corpuscules basaux forme une ligne visible en microcopie optique : la ligne des corpuscules basaux. Comme les centrioles, les corpuscules basaux ne présentent pas de microtubules centraux et sont formés de triplets de microtubules périphériques au nombre de 9.  Le corpuscule basal est relié d'une part à l'axonème par une structure nommée plaque basale et d'autre part au cytoplasme sous-jacent par la racine ciliaire (structure fibreuse dont la composition  et les fonctions  sont mal définies).

c) stéréocils : (stéréocils  signifie "qui mime les cils"). Les stéréocils se présentent comme des expansions fines, irrégulières  et parfois anastomosés de la membrane plasmique. Ils ne sont pas doués d'activité motrice. À la différence des cils, les stéréocils  ne  sont pas constitués de microtubules  et ne comprennent pas de corpuscules basaux. Un exemple typique est donné par le canal de l'épididyme.

3-2 différenciations du pôle apical : La présence de mucus dans le cytoplasme  apical de cellules épithéliales de revêtement défini une sous-population possédant une double appartenance aux tissus épithéliaux de revêtement et glandulaire.

Ces cellules prennent deux aspects distincts en microscopie optique :

a) les cellules dites à pôle muqueux ouvert ou l'importance des phénomènes d'exocytose donne l'impression optique d'une absence de membrane plasmique apicale. Ces cellules sont nommées cellules caliciformes. L'exemple typique est celui des cellules caliciforme de l'épithélium  intestinal.

b) les cellules à pôle muqueux fermé ou l'extrusion du produit de sécrétion est plus lente. Le meilleur exemple est donné par les cellules de l'épithélium gastrique.

3-3  kératinisation : il s'agit d'une différenciation concernant l'ensemble de la cellule et qui est spécifique  de l'épiderme. L’épiderme peut être défini comme un épithélium pavimenteux stratifié et kératinisé. Au sein de cet épithélium stratifié ou les cellules épithéliales sont nommées kératinocytes, le processus de kératinisation progresse de la profondeur vers la superficie La kératinisation  consiste en l'accumulation intracytoplasmique de grains de kératohyaline puis de sacs de kératohyaline qui vont progressivement occuper l'ensemble de la cellule. Ainsi, l'épiderme est essentiellement formé de 4 couches cellulaires qui sont de la profondeur vers la superficie :

        *  la couche basocellulaire ou couche basale ou couche germinative qui est constituée d'une assise de cellules souches épithéliales reposant sur la lame basale (assise = monocouche). Ces cellules sont responsables du renouvellement permanent de l'épiderme.   

         *  la couche spinocellulaire dont les cellules sont reliées par de nombreux desmosomes (d'ou l'aspect épineux en microscopie optique) et qui est également le siège de nombreuses mitoses.

         *  la couche granuleuse est formée par 3 à 5 assises de cellules qui contiennent des grains de kératohyaline, qui ne prolifèrent  pas et dont le noyau est pycnotique.

         * la couche cornée formée de cellules aplaties et anucléées renfermant des sacs de kératohyaline qui occupent l'ensemble du cytoplasme.

D) populations cellulaires spécifiques :

On trouve au sein des tissus épithéliaux de revêtement des cellules souches épithéliales et des cellules non épithéliales qui participent à des fonctions spécifiques au sein de chaque tissu épithélial.

1) cellules souches : après les cellules  sanguines, les cellules épithéliales de revêtement sont les cellules de l'organisme présentant le renouvellement le plus rapide. Celui-ci est assuré par une population de cellules souches résidentes qui sont caractérisées par : i) leur grand potentiel de prolifération et ii) leur capacité  à se différencier vers les types cellulaires épithéliaux du tissu dans lesquelles elles résident. Les cellules souches épithéliales  peuvent prendre la forme de cellules isolées s’intercalant entre cellules épithéliales matures. Elles sont alors toujours à proximité immédiate de la lame basale (à la différence des lymphocytes intra-épithéliaux qui eux sont des cellules isolées localisés à distance de la lame basale).  Dans d'autres cas, les cellules souches forment une assise de cellules basales  et participent alors à un épithélium stratifié (ex : épiderme). Enfin, les cellules souches peuvent se regrouper sous forme de zones germinatives  à partir desquelles les cellules filles migrent et renouvellent des régions de l'épithélium situées à distance de la zone germinative (ex : épithélium  intestinal).  Dans tous les cas (cellules isolées, assise basale et zone germinative), les cellules souches épithéliales  entretiennent des interactions  étroites avec la lame basale. Ces interactions permettent le contrôle de la prolifération et de la différenciation des cellules souches et sont à la base du concept de niche.

2) cellules non épithéliales  au sein des épithéliums de revêtement : Nous prendrons comme modèle d'étude l'épiderme et les 3 types cellulaires non épithéliaux qu'il accueille :  les mélanocytes, les cellules de Langerhans et les cellules de Merckel).

 

a) les mélanocytes : il s'agit de cellules à morphologie ramifiée, dérivant de la crête neurale, et dont la plus forte densité est trouvée à proximité de la lame basale. Elles contiennent des filaments intermédiaires de vimentine et non de cytokératine. Sous l'effet notamment des radiations U.V, les mélanocytes synthétisent la mélanine dans des organites spécifiques nommés mélanosomes. La mélanine est transmise sous forme de grains de mélanine aux kératinocytes voisins  qui vont la stocker dans les lysosomes. Chaque mélanocyte approvisionne ainsi plus de trente kératinocytes voisins, l'ensemble formant une unité épidermique de mélanogénèse. La mélanine participe à la protection de l'épiderme contre les radiations UV. En dehors de l’épiderme, on trouve également des mélanocytes, en faible nombre, au niveau des muqueuses ainsi qu'au niveau de la rétine et des méninges. 

b) les cellules de Langerhans : ce sont des cellules du système immunitaire localisées dans l'épiderme. Elles appartiennent à la famille  des cellules dendritiques dont la principale fonction est la capture et la présentation d'antigènes aux lymphocytes T. Les cellules de Langerhans chargées d'antigènes sont capables de migrer à travers la lame basale et de gagner les vaisseaux lymphatiques du tissu conjonctif sous-jacent puis de rejoindre les ganglions  lymphatiques  ou elles interagissent avec les lymphocytes T.  

c) les cellules de Merckel : ce sont des cellules  à double valence épithéliale et neuronale localisées dans l’épiderme des mains et des pieds au niveau des faces palmaire et plantaires. Elles exercent des fonctions neuro-sécrétoires et de récepteurs sensitifs.